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henri levavasseur - Page 2

  • Identité civique, identité ethnique...

    Nous reproduisons ci-dessous un entretien donné par Henri Levavasseur à la revue Le Bien Commun à l'occasion de la publication de son essai L'identité, socle de la cité - Réconcilier ethnos et polis (La Nouvelle Librairie, 2021).

    Docteur en histoire, médiéviste et germaniste, Henri Levavasseur a notamment collaboré à La Nouvelle Revue d’histoire, ainsi qu’à deux ouvrages édités par l’Institut Iliade : Ce que nous sommes — Aux sources de l’identité européenne (Pierre-Guillaume de Roux, 2018), et Nature, excellence, beauté — Pour un réveil européen (La Nouvelle Librairie, 2020). Il a également contribué à La Bibliothèque du jeune Européen, recueil dirigé par Alain de Benoist et Guillaume Travers (Le Rocher, 2020).

     

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    Identité civique, identité ethnique

    Jean-Yves Le Gallou évoque, dans l’Avant-Propos de votre livre L’identité, socle de la Cité, le « retour de balancier » qui viendrait contrecarrer la domination, fastidieuse et arrogante, des épigones de la démocratie libérale et mondialiste. Vous prônez l’organisation d’une avant-garde. Le stade de l’avant-garde n’est pas celui du retour de balancier : il y travaille, le prépare, sans avoir encore les moyens de restaurer l’équilibre. À quel moment nous trouvons-nous de la prise de conscience de la mutilation de nos identités, et par conséquent de notre vie sociale ?

    Nous vivons une crise sans précédent, caractérisée par l’ébranlement des fondements anthropologiques de notre civilisation. L’histoire semble s’accélérer de manière vertigineuse, atteignant le point névralgique où se produit la « fin d’un monde », pour reprendre le titre du dernier livre de Patrick Buisson.

    L’effondrement de la « maison commune » paraît imminent – phénomène qui surprend naturellement ceux qui persistent à s’aveugler sur le degré de solidité du vieil édifice. Pour les adeptes de la religion du progrès comme pour le « déclinistes », cette évolution s’inscrit dans le sens de l’histoire. Elle mène à l’instauration d’un nouveau monde qui ressemblera, pour le meilleur ou pour le pire, à celui qu’imaginent les sages de Davos. Telle n’est pas ma vision. Rien n’est écrit : ce nouveau monde sera ce que nous en ferons. C’est là qu’intervient la notion d’avant-garde, capable d’amorcer ce retour de balancier évoqué par Jean-Yves Le Gallou. Osons le dire : la question n’est plus celle des moyens nécessaires pour éviter une catastrophe dont le mécanisme se trouve déjà enclenché. Il s’agit en vérité de savoir comment nous traverserons cette épreuve, afin d’en sortir plus forts.

    « L’âme d’une nation ne se conserve pas sans un collège chargé de la garder », nous dit Renan. Tel est le rôle de l’avant-garde que nous devons former, en nous engageant dans la voie d’une véritable « révolution conservatrice ». Le mot de révolution ne renvoie pas ici à une entreprise de destruction. D’autres, hélas, se sont chargés de cette sinistre besogne. J’emploie le terme révolution au sens premier, pour désigner le mouvement de retour à l’origine qui se produit nécessairement à la fin d’un cycle, avant toute renaissance. Cet élan est conservateur, dans la mesure où il préserve le principe même de notre civilisation. Celui-ci ne réside pas dans des formes figées et périmées, mais dans la force vitale, dans le feu sacré qui brûle encore dans nos âmes. Pour entretenir cette flamme, il importe de procéder à ce que Renan appelait une « réforme intellectuelle et morale ».

    Le premier courage est celui de la lucidité. Sachons dresser un constat réaliste de l’état de la Cité. Le lien entre identité civique et identité ethnique est aujourd’hui rompu. Cette rupture s’est d’abord produite sur le plan symbolique et institutionnel, lors de la Révolution française, sans altérer d’emblée l’identité ethnoculturelle de la population. Un changement beaucoup plus radical s’est produit au cours de ces quarante dernières années, avec les vagues migratoires massives qui sont venu bouleverser nos équilibres démographiques plurimillénaires. Dans une certaine mesure, la première étape a préparé la seconde et l’a rendu possible. En coupant le lien qui unissait les institutions à la patrie charnelle, en instaurant une définition purement idéologique et contractuelle de la citoyenneté, le système républicain a directement contribué à briser nos défenses immunitaires. Il a créé une fragilité que nous avons longtemps pu ignorer, mais qui prend les proportions d’une faille béante lorsque survient le choc des grandes vagues migratoires. Confrontés à cette situation inédite, certains poursuivent désormais une sorte de fuite en avant. Ils continuent de chanter les louanges de la « diversité », ou de proclamer l’impérieuse nécessité du « vivre ensemble ». D’autres placent leur espoir dans l’hypothétique recours à une politique d’assimilation, sans doute possible au niveau individuel, mais parfaitement inopérante à l’échelle des millions d’êtres humains qui ont pénétré dans notre espace civilisationnel en l’espace de quelques décennies. Ces postures sont intenables, car elles conduisent à entériner une modification radicale de la substance des peuples européens, voués au déracinement sur leur propre terre.

    Ne nous y trompons pas : cette situation n’est que la conséquence de notre déclin civilisationnel, elle n’en est pas la cause. Jamais l’Europe n’eut été submergée par de telles vagues migratoires, si le traumatisme des deux Guerres mondiales n’avait auparavant plongé les Européens dans un état de complète sidération et d’oubli d’eux-mêmes. Le triomphe du modèle occidental libéral, matérialiste et universaliste, a effacé la « longue mémoire » de nos peuples au profit d’une mémoire sélective, orientée vers ce qui les nie et détruit leur âme.

    À l’instar de Renan, il ne faut pas se satisfaire du constat, mais proposer des remèdes. La seule issue possible est celle de la réaffirmation de notre identité. Ceci passe par une réflexion fondamentale sur « ce que nous sommes », réflexion que j’ai esquissée dans ce livre.

    Ernest Renan et son incontournable conférence de 1882, « Qu’est qu’une Nation », ne pouvaient être absents de votre ouvrage. Vous rappelez la volonté française, après l’humiliante défaite de 1870, de contester la conception allemande de la Nation, telle que Fichte la développa au début XIXe siècle. Dans son ouvrage « De la France d’abord à la France seule ; l’Action Française face au national-socialisme et au troisième Reich », Michel Grunewald écrit ( p52) : « Jacques Bainville soulignait que le nationalisme d’outre-Rhin se distingue de tous les autres du fait d’une particularité qui le rendait dangereux pour le reste de l’Univers : il déborde ses frontières parce qu’il ne les connait pas” ». Illimitation des prétentions universelles dans la conception française de la nation (quoique vous montriez que le discours de Renan est à la fois plus profond et plus subtil que cela), illimitation de l’expansion territoriale permise par la conception de la nation allemande héritée de Fichte, certes ici hâtivement résumée : n’est-ce-pas l’hybris, qui constitue le trait commun à ces deux approches, que l’on se plait si souvent à opposer ?

    Il faut tout d’abord se garder des caricatures et des anachronismes. Il suffit de relire la « Réforme intellectuelle et morale » de Renan, ouvrage auquel je faisais précédemment allusion, pour saisir toute la dette intellectuelle de l’auteur à l’égard de la pensée allemande dont il était familier. Fichte, pour sa part, fut d’abord un admirateur de la Révolution française avant d’écrire son célèbre « Discours à la nation allemande ». Nietzsche admirait les moralistes français du Grand siècle, tout comme Carl Schmitt fut influencé par la lecture de Maurras, avant d’inspirer les constitutionnalistes de la Ve république.

    Rappelons que Bainville et Maurras n’étaient nullement des monarchistes de tradition et de cœur, mais seulement de raison : c’est le sentiment de la faiblesse française face à la puissance de l’Empire allemand qui les a convertis à l’idée monarchique. Cette attitude est bien différente de celle des hommes qui se sont battus pour Dieu et le roi sous la Révolution. Parce qu’ils identifiaient la nation au souverain et concevait la patrie comme la « terre des pères », les chouans ou les soldats de Condé ne pouvaient reconnaitre aucune légitimité à la patrie idéologique des révolutionnaires. Ils ont donc logiquement préféré la marine anglaise et les canons prussiens au délire sanglant des sans-culottes. C’est une vision bien différente de celle qui légitime l’Union sacrée prônée par l’Action Française en 1914, comme l’a bien montré Jean de Viguerie dans son livre : « Les deux patries ». Sans doute le contexte de la première moitié du xxe siècle justifiait-il le « nationalisme intégral » de l’Action française. Mais peut-on encore se réclamer de la « France seule », devant le cataclysme qui menace aujourd’hui d’emporter toute notre civilisation ?

    Soixante-seize ans après la fin de la Seconde Guerre mondiale, cent-cinquante ans après la proclamation de l’Empire Allemand dans la galerie des glaces de Versailles, il est sans doute temps de dépasser certains antagonismes, et de percevoir ce qui unit les peuples d’Europe face aux mêmes périls existentiels, plutôt que ce qui peut continuer à les opposer pour le plus grand bonheur de leurs ennemis communs.

    Il convient de dénoncer l’imposture intellectuelle que constitue la récupération de la conférence de Renan par les tenants d’une construction nationale principalement idéologique, fondée sur l’adhésion à des « valeurs universelles ». Le texte de Renan est pourtant sans ambiguïté : « On aime la maison qu’on a bâtie et qu’on transmet. Le chant spartiate : “Nous sommes ce que vous fûtes ; nous serons ce que vous êtes” est dans sa simplicité l’hymne abrégé de toute patrie. » Nul doute que le Breton Renan, s’il revenait à nos côtés, se sentirait davantage d’affinités avec un Bavarois catholique, solidement enraciné dans sa terre et fidèle à ses traditions, qu’avec certaines militantes « indigénistes » françaises.

    Comprendre cela, ce n’est pas vouloir abolir nos différences et nos spécificités nationales, pour nous fondre dans un « grand tout » européiste et néo-jacobin, aussi universaliste et destructeur de nos patries charnelles que la construction « républicaine ». Celle-ci n’a d’ailleurs plus grand-chose à voir avec la notion de république au sens où l’entend encore Jean Bodin au XVIe siècle, c’est-à-dire avec l’exercice de la souveraineté en vue du bien commun de la Cité.

    Le siècle qui vient de s’écouler a surtout révélé les conséquences néfastes d’une forme hypertrophiée de nationalisme qui prend sa source dans l’hybris du patriotisme révolutionnaire, hérité de certains penseurs des Lumières. Dans cette perspective, l’histoire de l’occidentalisation du monde se confond, comme l’a bien vu Martin Heidegger, avec le déploiement d’une véritable « métaphysique de l’illimité ». La démesure propre au mythe du progrès linéaire et infini constitue le ressort ultime de la modernité. Face aux prétentions totalitaires de ce discours universaliste, c’est évidemment le retour à l’enracinement local qui permettra de ressouder le lien nécessaire entre la polis et l’ethnos.

    Vous distinguez les notions de polis et d’ethnos sans les opposer, mais en montrant les réalités qu’elles recouvrent, ainsi que le nécessaire ordonnancement des critères qui les fondent et des conditions qui garantissent leur pérennité. Elles sont aujourd’hui en désordre, au point précisément d’animer un lancinant débat sur la priorité à établir entre promotion de la souveraineté et promotion de l’identité, ou sur la recherche du Bien Commun, par exemple chez Guilhem Golfin. En quoi le rappel des différences et des complémentarités entre les notions de polis et d’ethnos peut-il utilement contribuer à ce débat ?

    Pour saisir le caractère fondamental de l’articulation entre ces deux notions, il faut revenir à une anthropologie réaliste, débarrassée de la vision libérale fondée sur une vision abstraite de la nature humaine. L’homme n’est pas un individu doté de droits universels protégés par un contrat social. Aristote nous rappelle que l’homme est un animal politique : il n’est pas citoyen du monde, mais membre d’une Cité, d’un espace politique clairement délimité. Par ailleurs, l’homme est un « être de culture par nature », comme l’a montré Arnold Gehlen. Cela signifie que la disparition des limites et des frontières mène à la disparition de toute forme de culture enracinée, c’est-à-dire à une dénaturation profonde de l’existence humaine. Car l’émergence d’une culture authentique suppose l’alliance d’un certain type d’homme et d’un territoire. La culture ne se réduit pas à un simple savoir, c’est-à-dire une donnée échangeable. Elle est un phénomène vivant, plongé dans le fleuve de l’histoire, et suppose l’existence d’une communauté humaine qui l’incarne. Elle s’exprime à travers un ethos spécifique, qui traduit le génie propre à un ethnos (les deux mots étant d’ailleurs étymologiquement apparentés).

    La notion d’éthique renvoie, dans le sens premier du mot grec, à une « position dans le monde » : elle suppose un enracinement, la combinaison d’une hérédité et d’un milieu, l’attachement à un lieu, à un topos à partir duquel l’existence humaine se déploie. Tel des arbres majestueux, les hautes cultures peuvent couvrir de leur ramure un espace d’autant plus vaste que leurs racines sont profondes : elles possèdent à ce titre une dimension universelle, dans la mesure où elles enrichissent la polyphonie de la diversité humaine. Ce phénomène n’a rien à voir avec l’idéologie « universaliste », qui prétend regrouper l’humanité dans une catégorie unique. Fonder la Cité sur une démarche purement contractuelle, la transformer en un conglomérat d’individus sans passé commun, c’est ignorer à la fois les conditions de son existence et sa vocation ultime, qui est de permettre l’épanouissement d’un type humain et d’une culture.

    Résolument détaché du réel, l’idéalisme des Lumières aboutit à deux excès contradictoires : réduire l’homme à une entité abstraite, ou à une « machine biologique ». Or, les hommes et les peuples sont porteurs d’un double héritage, culturel et génétique. Ces deux dimensions ne se confondent pas, mais ne sont pas non plus entièrement dissociables. Incapables de penser ensemble ces deux aspects de l’identité, nos contemporains souffrent aujourd’hui d’une véritable hémiplégie intellectuelle, qui provoque des débats stériles et sans fin sur le sexe des anges. Au lieu d’opposer l’identité civique et l’identité ethnique, il convient d’en saisir le nécessaire ordonnancement, fruit d’une très longue histoire. La rupture de cet équilibre rend illusoire l’exercice d’une souveraineté orientée vers la défense du bien commun, puisqu’elle entraine précisément la disparition de la notion même de « communauté ». Ce dernier terme n’est plus guère employé qu’en mauvaise part aujourd’hui, alors qu’il désigne la matrice de la philia, de l’affectio societatis qui constitue le socle de tout édifice politique.

    Vous incitez dans votre ouvrage les Européens à reprendre conscience de leur longue mémoire, dans laquelle vous discernez précisément l’origine d’un destin commun (p. 51) : « À défaut d’unité politique, l’espace géographique de l’Europe coïncide de toute évidence avec l’existence d’un ensemble de peuples étroitement apparentés par l’origine, la culture et les mœurs. » Le constat est sans appel. Mais cette coïncidence des origines ne présage pas de la capacité des peuples européens à accomplir de grandes choses ensemble, du moins volontairement. Beaucoup des sommets du « génie européen » relevèrent davantage de la prédation (concrète ou symbolique), que de la circulation harmonieuse. Les peuples qui composent la France mirent quasiment un millénaire à se fondre dans l’espace national, jusqu’aux sinistres exacerbations républicaines. Alors que la France et l’Europe seraient en « dormition », quelle cause pourrait convaincre des peuples européens différents à conjuguer leur génie ? Cette conjugaison du génie de peuples différents a-t-elle la moindre chance d’exister mue par des volontés libres, et non par un pouvoir autoritaire ?

    La prise de conscience d’un destin commun n’implique pas nécessairement la constitution immédiate d’une unité politique. En tant que civilisation, l’Europe n’existe qu’à travers le développement polyphonique d’identités spécifiques, dont les voix concordent parce qu’elles sont issues d’une matrice commune. À l’échelle du continent, le peuplement de l’Europe n’a connu aucun bouleversement majeur depuis l’arrivée des conquérants indo-européens issus des steppes pontiques, au quatrième millénaire avant notre ère. Ces derniers nous ont légué leur langue, qui se trouve à l’origine de la quasi-totalité des langues européennes connues, anciennes et modernes. L’héritage de leur vision du monde transparaît encore à travers l’aube grecque de la pensée et l’essor du génie politique romain. Le même héritage a également joué un rôle déterminant dans l’élaboration des cultures celtiques, germaniques et slaves. Combiné à l’apport nouveau du christianisme, l’imperium romain, dont le legs fut bientôt revendiqué par les royaumes barbares qui en avaient précipité la chute, a imprimé sa marque de manière plus ou moins directe sur l’ensemble continent, en particulier dans le domaine du droit et des institutions politiques.

    Si la nostalgie de l’unité romaine a pu inspirer différentes tentatives de renovatio imperii depuis le Moyen Age, force et de constater que ces tentatives n’ont jamais abouti qu’à des constructions éphémères, en dehors du Saint Empire Romain germanique (dont les frontières n’ont cependant jamais coïncidé avec celle de l’Europe dans son ensemble). À plusieurs reprises pourtant, les nations chrétiennes ont su manifester leur solidarité face à un péril commun : ce fut notamment le cas sous les murs de Vienne, en 1683, face aux Ottomans.

    On peut donc espérer que l’Europe sera capable une fois encore de se ressaisir au bord du gouffre, pour paraphraser Nietzsche. La situation présente est cependant bien différente de celle du dernier siège de Vienne : il ne s’agit plus de repousser les assauts d’une puissance étrangère installée sur une partie de l’Europe centrale et balkanique à la suite d’une conquête militaire, mais de sauver ce qui subsiste de nos vieilles patries, menacées dans leur être même par un véritable changement de substance ethnique, combiné à la destruction systématique des repères éthiques et anthropologiques fondamentaux. Ce péril est infiniment plus grand que le précédent. Il ne pourra être contré sans que les peuples européens, confrontés aux mêmes dangers mortels, n’unissent leurs efforts. Cette réaction ne passera pas nécessairement par un processus d’unification politique, mais plus surement par le rejet des institutions européennes actuelles, dont la vocation semble être de désarmer nos nations plus que de les défendre.

    Société ouverte, dictature des droits individuels, empire accablant de l’état de droit sur le destin des Nations : bien des maux abiment jusqu’à l’âme des hommes qui habitent les Nations européennes. S’ils sont évidemment les héritiers d’un temps long, ils sont aussi les débiteurs, malheureux et involontaires, des inhumanités de la vie contemporaine. La flamme de la longue mémoire peut-elle brûler encore chez suffisamment d’entre eux, pour que votre appel à « fuir le laisser-aller et refuser l’abandon de soi-même » (p. 73) trouve un écho ?

    Dans son livre La fin d’un monde, que j’évoquais au début de cet entretien, Patrick Buisson définit l’époque contemporaine comme une vertigineuse « montée du vide ». En d’autres termes, la société actuelle se caractérise par une longue éclipse du sacré, auquel se substitue la domination sans partage du matérialisme le plus trivial. Or, le poète allemand Hölderlin nous le rappelle : « Au cœur du danger, croît ce qui sauve ». Le désarroi dans lequel nous abandonnent les faux prophètes de l’heure nous force précisément à trouver en nous-même les ressources nécessaires pour faire face à la montée des périls. Cette situation nous contraint à l’excellence. Comme nous y invitait Dominique Venner dans Un samouraï d’Occident (pp. 296-297), il nous faut cultiver « chaque jour, comme une invocation inaugurale, une foi indestructible dans la permanence de la tradition européenne ». Le discours de nos adversaires, ou de tous ceux qui rabâchent les vielles antiennes « humanistes », apparait de moins en moins légitime. Il devient même tout simplement inaudible, parce qu’il se heurte au mur d’une réalité de plus en plus insupportable.

    Face à cette situation, les « déclinologues » de talent ne manquent pas : ils savent parfaitement analyser les symptômes de notre déclin, mais plus rarement imaginer des remèdes nouveaux, à la hauteur du mal qui nous étreint. C’est pourquoi je demeure intimement persuadé de la venue du kairos, du moment propice et décisif, où notre voix entrera en résonance avec l’histoire. D’où la nécessité impérieuse de réveiller par tous les moyens la conscience de l’ethos européen au sein d’une véritable avant-garde : car il suffira comme toujours d’une minorité consciente et agissante pour saisir le destin à bras le corps, et emporter la décision à l’instant opportun. Il faudra d’ici-là faire preuve de courage et d’endurance, en s’appuyant sur les communautés naturelles, sociales et politiques, notamment à l’échelon local, où l’esprit du bien commun peut encore s’épanouir. Car les périls montent.

    À cet égard, deux « remplacements » s’opèrent, qui saccagent profondément les mœurs des sociétés européennes : le premier par l’importation massive de populations aux racines absolument étrangères aux cultures européennes, l’autre au sein même de l’Europe, avec la promotion d’une série de constructions d’identités loufoques, fondées sur la souffrance identitaire post-coloniale et le plus petit commun dénominateur des inclinations sexuelles : au nom de « l’intersectionnalité des luttes », la famille traditionnelle semble vouée à la destruction, et toute piété devant le legs des Anciens devient proscrite. Ces deux remplacements, l’un altérant la culture du peuple français, l’autre le « divisant de l’intérieur », comme vous le soulignez, sont-ils à vos yeux d’une importance égale, ou hiérarchisez-vous leur dangerosité ?

    Comment hiérarchiser deux périls mortels, qui procèdent l’un et l’autre d’une même vision « fluide » de l’identité, destinée à rompre tous les obstacles qui viennent encore freiner l’accélération frénétique du « doux commerce » mondial : familles, communautés enracinées et peuples ? À cet égard, l’instauration du « mariage pour tous » apparait comme l’une des étapes les plus subversives dans le processus de transgression et de déconstruction en cours depuis 1968 : sous le prétexte de garantir l’accès de « tous » à certains droits, elle vise en réalité à modifier la nature même de l’institution du mariage pour s’attaquer au modèle de la famille en tant que cellule sociale fondée sur la transmission héréditaire. Il s’agit d’un acte éminemment « politique », qui va de pair avec l’ouverture des frontières à tous les vents du grand remplacement démographique. Il n’est donc pas possible de défendre une certaine éthique sans défendre avec le même opiniâtreté notre identité dans toutes ses composantes ethnoculturelles. L’inverse est également vrai : ethos et ethnos vont de pair. Nos ennemis ne s’y trompent pas : derrière le ridicule des postures, « l’intersectionnalité des luttes » présente une réelle cohérence révolutionnaire, que les défenseurs de la « morale traditionnelle » n’ont pas toujours perçue.

    Il est donc grand temps de refonder la Cité sur une compréhension authentique de « ce que nous sommes ». Pour le dire avec Julien Langella, il nous faut « refaire un peuple ».

    Ce réveil d’une conception de la Nation réinvestie par des critères de sociabilité naturelle (proximités ethniques, linguistiques, religieuses) charmera nombre de nos lecteurs. Nous connaissons cependant la panique de nos contemporains, provoquée à grands coups de diabolisations historiques, devant toute remise en cause de la « nationalité républicaine ». Est-il encore possible de leur proposer une conception de la nationalité émancipée d’un pur idéalisme contractualiste ?

    L’aveuglement idéologique et la crispation autoritaire du système sur des positions intenables évoquent la fin du monde soviétique : pour les peuples vivant à l’Est du rideau de fer, il ne semblait y avoir d’autres univers possibles que celui du collectivisme marxiste, jusqu’au moment où le régime s’est effondré comme un château de cartes. Du jour au lendemain, ce qui paraissait relever d’un dogme intouchable devint un objet de ridicule et de rejet. Il s’agit d’un précédent historique à méditer.

    Rien ne garantit qu’il nous sera donné de vivre le moment où nos peuples retrouveront le chemin de la liberté et de la grandeur. Mais quoi qu’il advienne de nos destins personnels, puissions-nous n’avoir jamais à encourir de nos enfants le blâme qu’exprime la terrible phrase de Kipling : « Si l’on vous demande : pourquoi sommes-nous morts ? Répondez : parce que nos pères nous ont menti. »

    Henri Levavasseur (Le Bien commun, juin 2021)

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  • L'identité des peuples : un double héritage culturel et biologique...

    Nous reproduisons ci-dessous un entretien donné par Henri Levavasseur à Breizh Info à l'occasion de la sortie de son essai L’identité, socle de la Cité. Réconcilier ethnos et polis (La Nouvelle Librairie, 2021).

    Docteur en histoire, médiéviste et germaniste, Henri Levavasseur a notamment collaboré à La Nouvelle Revue d’histoire, ainsi qu’à deux ouvrages édités par l’Institut Iliade : Ce que nous sommes — Aux sources de l’identité européenne (Pierre-Guillaume de Roux, 2018), et Nature, excellence, beauté — Pour un réveil européen (La Nouvelle Librairie, 2020). Il a également contribué à La Bibliothèque du jeune Européen, recueil dirigé par Alain de Benoist et Guillaume Travers (Le Rocher, 2020).

     

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    Henri Levavasseur : « L’identité des peuples se fonde sur un double héritage, culturel et biologique »

    BREIZH INFO : Henri Levavasseur, pouvez-vous vous présenter brièvement à nos lecteurs ?

    HENRI LEVAVASSEUR. Historien et linguiste de formation, je m’intéresse depuis longtemps à la genèse des cultures de l’Europe ancienne. Ma vision du monde a par ailleurs été fortement influencée par la lecture de Martin Heidegger et la manière dont ce philosophe reprend les questionnements fondamentaux de la pensée grecque pour parvenir à une compréhension intime de la modernité. Attaché à mes racines normandes, j’accorde une grande importance à la notion de « patrie charnelle », telle que la conçoivent Barrès et Péguy. Soucieux de transmettre la flamme aux jeunes générations à l’heure où se joue le destin de l’Europe, je me suis tout naturellement rapproché de l’institut Iliade, qui accomplit dans ce domaine un travail remarquable.

    BREIZH INFO : Votre essai constitue une réflexion fondamentale sur la notion d’identité, et sur l’articulation de cette notion avec la Cité, c’est-à-dire avec le Politique. Quelle est votre vision de l’identité de la nation française ? L’identité politique de la république ne s’est-elle pas construite en niant précisément l’identité « charnelle » des peuples et des régions ?

    HENRI LEVAVASSEUR. Les entités politiques ne doivent pas être pensées comme des notions abstraites et figées, mais comme des réalités organiques. En tant que telles, elles constituent des ensembles qui valent plus que la somme de leurs parties, mais qui ne peuvent se maintenir en vie lorsque les organes qui les composent cessent de fonctionner harmonieusement. De même, la nation est une entité politique souveraine, qui représente plus que la somme des identités régionales et locales qu’elle rassemble, mais qui ne peut exister de manière pérenne sans ces dernières. La nation est un organisme vivant dont les familles, les communes, les régions forment en quelle sorte le « corps ». Être français, ce n’est pas (ou pas seulement) adhérer à des « valeurs » et à des institutions politiques, c’est d’abord être Normand, Picard, Breton, Provençal, Lorrain (pour ne citer que quelques-unes des identités réelles et enracinées qui constituent collectivement l’essence de la nation française, telle qu’elle s’est progressivement formée au fil des siècles).

    Depuis la Révolution française, cette conception organique de la nation tend malheureusement à disparaitre au profit d’une conception idéologique coupée du réel et de l’histoire, fondée sur des valeurs à prétentions universalistes, intangibles et « républicaines ». J’entoure ici de guillemets l’adjectif « républicain », puisque ce discours, révolutionnaire et subversif par essence, vise à nier ou à transformer de manière radicale l’identité française héritée de notre histoire : ce républicanisme-là n’a plus guère à voir avec le service de l’état et du bien commun, c’est-à-dire avec la res publica au sens romain (signification que ce mot conserve encore sous la plume du juriste Jean Bodin au WVIe siècle).

    Il est d’ailleurs assez paradoxal que les révolutionnaires français se soient réclamés du système romain, fondé sur une conception très inégalitaire et aristocratique de la citoyenneté. Mais ces rêveurs sanguinaires n’étaient pas à une contradiction près : ne prêchaient-ils pas l’amour de l’humanité tout en exterminant les Vendéens ? J’évoque dans mon essai les circonstances horribles de la mort de la princesse de Lamballe, massacrée dans des conditions de sauvagerie qui rappellent étrangement l’égorgement récent d’un professeur de lycée par un mahométan fanatique…

    BREIZH INFO : L’invocation des « valeurs de la république », qui prend aujourd’hui une dimension quasiment religieuse, ne dissimule-t-elle pas, derrière les appels à l’unité nationale, la fracture béante qui traverse la société française ?

    HENRI LEVAVASSEUR. De toute évidence, la question de l’identité de la France se pose aujourd’hui en des termes nouveaux, du fait de l’entrée sur notre territoire, en l’espace d’un demi-siècle à peine, de millions d’immigrés provenant de l’espace extra-européen. A l’échelle du contingent, c’est un phénomène d’une ampleur sans équivalent depuis la Préhistoire. Je renvoie sur ce point aux travaux de l’un de nos plus grands démographes, le regretté Jacques Dupâquier, membre de l’Institut.

    Le traumatisme culturel, social, économique et politique provoqué par l’arrivée de ces flux humains considérables a créé en France, mais aussi dans la plupart des pays d’Europe, une véritable fracture entre l’identité ethnoculturelle et l’identité civique, entre ce que les Grecs nommaient, à l’aube de l’histoire européenne de la pensée, l’ethnos (« ethnie ») et la polis (« cité »).

    C’est le constat de cette fracture sans précédent, qui menace la cohésion et l’existence même des nations et des peuples d’Europe, qui m’a conduit à écrire ce livre, afin d’inciter mes contemporains à prendre toute la mesure du problème, et surtout à trouver en eux-mêmes les ressources nécessaires pour redonner à nos nations l’avenir qu’elles méritent.

    BREIZH INFO : Comment concevez-vous donc la notion même d’identité ? Est-ce une donnée figée ? L’identité n’est-elle pas, comme l’affirment certain, une construction en perpétuelle évolution ?

    HENRI LEVAVASSEUR. L’identité des peuples doit naturellement être pensée de manière dynamique : elle est soumise, comme toute réalité vivante, à la loi du devenir. Pour comprendre l’origine et le sens de notre identité, il faut donc revenir aux fondements d’une saine anthropologie. En dépit de ce qu’affirment les tenants de l’idéologie libérale-libertaire, l’homme n’est pas une construction abstraite : il ne se réduit pas à l’image d’un individu doté à la naissance de droits universels, libre de signer un « contrat social » avec ses pairs. Nous savons tout au contraire, depuis Aristote, que l’homme est un « animal politique ». Cela signifie que son identité se construit dans l’espace d’une Cité, sur un territoire où s’exerce une souveraineté, qui permet de garantir la pérennité et le développement d’une culture. Car la « nature » de l’homme est précisément celle d’un « être de culture », comme l’a bien montré le philosophe allemand Arnold Gehlen dans son ouvrage magistral intitulé L’homme, dont la traduction française vient de paraître cette année chez Gallimard. L’existence de la personne humaine se déploie donc toujours, dès l’origine, dans le cadre d’une famille et d’un peuple.

    L’identité des peuples se fonde sur un double héritage, culturel et biologique. Les deux dimensions sont indissociables et se « façonnent » mutuellement, en constante interaction avec le milieu et le territoire. C’est pourquoi les revendications très platement « racialistes » des « indigénistes » sont absurdes : vouloir revendiquer des droits en fonction de la couleur de peau, indépendamment de l’appartenance à une cité, à un territoire et surtout à une culture, n’a aucun sens.

    BREIZH INFO : Existe-t-il donc pour vous une identité « européenne », ou l’Europe n’est-elle qu’une construction vide de sens, un fantasme dangereux qui s’opposerait à l’identité des nations ?

    HENRI LEVAVASSEUR. Les peuples d’Europe ont en commun plus de cinq mille ans d’histoire, ce que confirment les données établies par la linguistique indo-européenne, l’archéologie et la paléogénétique. Je renvoie ici à la synthèse récente publiée par le généticien David Reich, de l’université de Harvard (Comment nous sommes devenus ce que nous sommes, Quanto, 2019).

    L’Europe, ce n’est pas l’Occident, ou plutôt : l’Occident, ce n’est plus l’Europe. Les notions d’Europe et d’Occident ont certes été plus ou moins synonymes jusqu’au xxe siècle. Mais la « Grande guerre mondiale de trente ans », qui a éclaté en 1914 et s’est achevée en 1945, a laissé les nations européennes exsangues, soumises pour moitié au joug communiste, pour moitié à la domination américaine. Or, depuis la chute du système soviétique et le retour des nations d’Europe centrale à la liberté, les concepts d’Occident et d’Europe ne se recoupent plus : l’Occident prend de plus en plus la forme d’un système idéologique libéral-libertaire mondialiste, hostile à l’identité, à la culture, aux traditions, aux intérêts et à la souveraineté des nations européennes.

    Il va de soi que l’Europe ne se confond pas davantage avec l’édifice institutionnel de l’U.E., qui s’acharne précisément à nier l’existence de l’identité européenne, en réduisant cette dernière aux « valeurs » occidentales, et en transposant à l’échelle du continent les aberrations du discours idéologique jacobin.

    A la différence des nations qui la composent, l’Europe n’est pas une entité politique. Elle est à la fois autre chose que cela, et bien plus. Elle constitue un espace de civilisation, dont l’existence ne peut être distinguée de celle des cultures, des nations et des peuples qui l’incarnent et lui donnent vie. Cet ensemble véritablement polyphonique se déploie sur un territoire délimité par la géographie et l’histoire, c’est-à-dire par le poids des réalités géopolitiques. L’Europe, c’est une très longue mémoire partagée. C’est la conscience de racines communes, d’autant plus solides qu’elles plongent dans un passé plurimillénaire. C’est la claire vision de l’appartenance à un « concert des nations chrétiennes », voué à dépasser les antagonismes immédiats lorsque les périls extérieurs menacent la pérennité même de l’ensemble. L’Europe, c’est l’union sacrée des nations chrétiennes se portant au secours de Vienne, capitale du Saint-Empire romain germanique, afin de repousser les Ottomans qui l’assiègent en 1683.

    BREIZH INFO : L’Europe que vous évoquez est-elle donc un produit de l’histoire, un reflet du passé ? En quoi la référence à l’héritage de l’Europe ancienne peut-il aider dans l’avenir nos peuples à préserver et réaffirmer leur identité ?

    HENRI LEVAVASSEUR. Recueillir et revendiquer cet héritage, ce n’est pas s’enfermer dans une vision figée ou idéalisée du passé, c’est parvenir à une compréhension intime de « ce que nous sommes », de ce qui constitue notre spécificité en tant que peuples porteurs de cultures issues d’une matrice commune. C’est mieux saisir ce qui caractérise notre vision du monde et l’éthique qui nous anime. Les mots grecs ethos (« éthique ») et ethnos (« ethnie ») sont d’ailleurs étymologiquement apparentés. Cette relation étymologique est évidemment significative : l’éthique est une manière de « se tenir », conformément à l’usage reçu des aïeux.

    Se réapproprier notre héritage, c’est concevoir l’identité comme la réalisation d’un potentiel et l’expression d’un génie propre, qui permet d’agir dans le monde d’une manière conforme à notre nature, c’est-à-dire à notre culture. Prendre conscience de « ce que nous sommes », c’est acquérir l’intuition de « ce que nous pouvons ». Renan, dans son célèbre discours sur la nation, ne dit pas autre chose : une nation, écrit-il, est un « principe spirituel » qui unit la mémoire d’un passé commun à la volonté de prolonger cet héritage. Renan ne dit pas que la nation se réduit à l’expression d’une volonté de « vivre ensemble », mais que cette volonté, naturellement indispensable à la pérennité de notre souveraineté politique, n’a de sens et de solidité que dans la mesure où elle s’enracine dans un patrimoine spirituel commun.

    C’est pourquoi le discours à prétentions « républicaines », dans son extrémisme subversif, ne peut pas se réclamer de Renan sans le travestir. Je suis d’ailleurs parti de ce constat pour écrire ce livre.

    BREIZH INFO : Comment procéder selon vous à la prise de conscience identitaire que vous appelez de vos vœux ? Quelles formes concrètes cette démarche peut-elle adopter ?

    HENRI LEVAVASSEUR. Reprendre conscience de « ce que nous sommes », c’est-à-dire de ce qui nous caractérise en tant que peuple, implique naturellement de rejeter l’absurdité de la « cancel culture », mouvement qu’il faut plutôt qualifier de « culture cancel » : non pas « culture de l’effacement », mais bien « effacement de la culture » !

    Il faut également renoncer aux illusions de l’intégration soi-disant « républicaine », qui prétend imposer à tous (sans en être réellement capable) le respect de « valeurs » plus ou moins universelles (donc abstraites), au prix de notre identité spécifique et de nos libertés concrètes : afin de séduire des éléments exogènes qui ne voient aucune nécessité ni aucun intérêt à s’intégrer, les populations autochtones sont sommées de renoncer à leur identité propre. Cela n’est pas acceptable.

    Comme nous y invite Julien Langella dans un ouvrage récent, il faut « refaire un peuple », conscient de son histoire et de sa vocation propre. De manière concrète et pratique, cela signifie qu’il faut rebâtir la Cité à partir de ses fondations, en s’appuyant sur les « communautés organiques » que les tenants de l’idéologie révolutionnaire « arc-en-ciel » s’efforcent précisément de détruire. Ces communautés naturelles, historiques et politiques sont par exemple la famille, la paroisse, la commune, le terroir ou la région – conçues non pas comme de simples entités administratives, mais comme des communautés liées à un territoire, au sein desquelles s’épanouit une identité à la fois enracinée et incarnée, à l’échelle individuelle aussi bien que collective. C’est dans ce cadre qu’il devient possible de réveiller le sens du « bien commun », en saisissant toutes les occasions de redonner vie à nos traditions. Non pas pour singer le passé ou se complaire dans le folklore, mais pour que les germes de vie contenus dans ces traditions puissent à nouveau croître, sans être étouffés par la grisaille « républicaine », la folie « woke », ou les velléités suprématistes manifestées par des cultures exogènes. La jeunesse a un rôle clé à jouer dans ce processus de renouveau, qui doit être guidé naturellement par une « avant-garde ». Tel est l’appel que je lance dans la conclusion de mon ouvrage – tâche ambitieuse à laquelle travaille notamment l’institut Iliade, à travers ses cycles de formation. Il ne s’agit pas pour l’Institut de dispenser un savoir académique, mais de réveiller les mémoires et les énergies, et de proposer un modèle de solidarité communautaire fondée sur la philia, sur la conscience identitaire vécue au quotidien et partagée. Cette avant-garde devra s’engager dans toutes les formes de vies associatives (culturelles et artistiques, intellectuelles et scientifiques, professionnelles et économiques, mais aussi politiques) pour affirmer, moins par le discours que par l’exemple, sa capacité à se réapproprier notre identité et à la faire vivre.

    Dans le même temps, l’importance accordée à la dimension communautaire et locale ne doit pas dispenser ce qui le veulent, et le peuvent, d’exercer une influence à d’autres échelons, dans les cercles décisionnels au sein desquels ils auront su pénétrer. Si nos communautés sont des sanctuaires, où sont préservées les sources pérennes de notre identité, cela ne doit pas nous amener à déserter pour autant l’horizon du politique : n’oublions pas qu’il nous faudra un jour, le moment venu, savoir à nouveau manier les instruments de la puissance.

    Enfin, cette entreprise de reconquête intérieure ne pourra provoquer un véritable renouveau de notre civilisation que si elle est menée simultanément dans tous les pays d’Europe, qui doivent plus ou moins faire face aujourd’hui aux mêmes défis. La tâche est immense et exaltante. Elle requiert toute notre intelligence, toute notre volonté, et surtout tout notre courage. Il n’est plus temps de reculer, ni même de tergiverser. Comme l’écrit Ernst Jünger dans le Traité du Rebelle : « La grandeur humaine doit être sans cesse reconquise. Elle triomphe lorsqu’elle repousse l’assaut de l’abjection dans le cœur de chaque homme. C’est là que se trouve la vraie substance de l’histoire. »

    Henri Levavasseur, propos recueillis par Yann Vallerie (Breizh Info, 28 avril 2021)

     

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  • L'identité, socle de la cité...

    Les éditions de La Nouvelle Librairie, en collaboration avec l'Institut Illiade, viennent de publier un essai d'Henri Levavasseur intitulé L'identité, socle de la cité - Réconcilier ethnos et polis

    Docteur en histoire, médiéviste et germaniste, Henri Levavasseur a notamment collaboré à La Nouvelle Revue d’histoire, ainsi qu’à deux ouvrages édités par l’Institut Iliade : Ce que nous sommes — Aux sources de l’identité européenne (Pierre-Guillaume de Roux, 2018), et Nature, excellence, beauté — Pour un réveil européen (La Nouvelle Librairie, 2020). Il a également contribué à La Bibliothèque du jeune Européen, recueil dirigé par Alain de Benoist et Guillaume Travers (Le Rocher, 2020).

    docteur en histoire, médiéviste et germaniste

     

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    " Confrontés en l’espace de quelques décennies à l’arrivée massive de populations exogènes, la plupart des peuples d’Europe sont aujourd’hui sommés par leurs propos dirigeants de renoncer à leur identité ethnique et culturelle au profit d’un nouveau modèle de société cosmopolite, fondé sur l’adhésion à des « valeurs » abstraites et universelles. La perte de tout équilibre entre communauté ethnique et communauté civique menace la pérennité même de nos nations. Henri Levavasseur invite dans cet ouvrage les peuples d’Europe à reprendre collectivement conscience de « ce que nous sommes », afin de refonder la cité sur le socle de l’identité. "

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  • L’identité civilisationnelle de l’Europe est-elle « judéo-chrétienne » ?...

    Nous reproduisons ci-dessous un texte important d'Henri Levavasseur cueilli sur le site de l'Institut Iliade et consacré l’identité civilisationnelle de l’Europe. L'auteur est docteur en histoire et linguiste.

     

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    L’identité civilisationnelle de l’Europe est-elle « judéo-chrétienne » ?

    À l’heure où l’action de réseaux d’influence islamistes, alimentée sur notre sol par des décennies d’immigration massive, se conjugue à une formidable montée du « terrorisme intellectuel » pratiqué par les militants « déconstructivistes » (« cancel culture », antiracisme racialiste, féminisme « ultra », etc.), la pérennité de l’identité ethnique et culturelle des peuples européens se trouve gravement menacée. Toutefois, des voix courageuses s’élèvent, de plus en plus nombreuses, pour appeler à la défense de notre identité civilisationnelle, que de nombreux écrivains, penseurs ou polémistes qualifient alors volontiers de « judéo-chrétienne ».

     

    Est-il cependant exact et pertinent de définir ainsi la civilisation européenne ? Cette dernière doit-elle être essentiellement conçue comme d’origine « judéo-chrétienne » ?

    Nous ne le pensons pas, pour deux raisons principales, l’une tenant à l’histoire des peuples européens, l’autre à l’histoire des religions.

    Il convient en effet de rappeler, tout d’abord, que les racines de la civilisation européenne sont antérieures au christianisme.

    Les langues parlées aujourd’hui par les peuples européens (langues romanes, germaniques, celtiques, slaves, baltes et langue grecque moderne) appartiennent en leur immense majorité (à l’exception du basque, du hongrois, du finnois et de l’estonien) à la famille des langues « indo-européennes », ce qui signifie qu’elles sont quasiment toutes issues d’une langue mère commune, vieille de plus de 5 000 ans. Or, dans la mesure où la langue structure la pensée, cet héritage constitue un pan essentiel de notre civilisation.

    En outre, aucune migration ou colonisation d’origine extérieure à l’ensemble indo-européen n’a été suffisamment massive – parmi celles qui ont touché certaines régions d’Europe depuis ces cinq derniers millénaires – pour bouleverser radicalement la composition de la population européenne à l’échelle du continent (à l’exception des vagues migratoires de ces dernières décennies, qui constituent un phénomène sans précédent dans la longue histoire de l’Europe, précisément depuis l’époque de la diffusion des langues indo-européennes). Ce constat est aujourd’hui confirmé sans équivoque par les résultats des études paléogénétiques les plus récentes. La plupart des Européens ne sont donc pas seulement les locuteurs d’une langue indo-européenne (comme le sont également les populations afro-américaines qui communiquent en anglais), mais aussi les descendants de lignées ancestrales « indo-européennes », autochtones depuis des millénaires.

    Les peuples d’Europe ont atteint un stade avancé de civilisation, dès l’âge du bronze, il y a plus de trois mille cinq cents ans.

    En ce qui concerne le développement des sciences et des arts, mais aussi dans le domaine des grands principes d’organisation sociale et politique, l’Europe est par ailleurs l’héritière de la pensée grecque et du modèle romain, qui sont également antérieurs au christianisme.

    Les sites de Stonehenge, du Parthénon ou du forum romain ont été érigés bien avant la conversion de l’Empire romain au christianisme. Ils sont les témoignages tangibles de l’antiquité de notre civilisation.

    Il ne s’agit pas pour autant de méconnaître l’importance des influences extérieures, notamment orientales, qui se sont exercées sur la civilisation européenne à différents stades de son histoire : aucune civilisation ne se développe sans contact avec ses voisines, avec lesquelles elle entretient tour à tour des rapports conflictuels ou pacifiques, ce qui conduit nécessairement à un jeu permanent d’influences mutuelles. Pour autant, la civilisation européenne est bien distincte de celles qui l’entourent ; elle possède son identité propre, et les influences qu’elle a reçues ou transmises au fil des siècles ne doivent pas conduire à ignorer la spécificité de cette identité.

    À ce titre, le christianisme n’appartient pas aux « racines » de l’Europe, mais constitue bel et bien une « greffe » qui a naturellement modifié la croissance de l’arbre sur laquelle elle s’est implantée à un stade déjà avancé de son développement plurimillénaire.

    Ici encore, le constat ne vise pas à remettre en cause l’importance de l’apport chrétien au sein de notre civilisation. Celle-ci serait sans doute fort différente de ce qu’elle est devenue (pour le meilleur ou le pire, nul ne le peut le dire), si cette « greffe » ne s’était pas produite. Vibrer au souvenir de nos lointains aïeux devant le spectacle des ruines de Stonehenge ou du Parthénon n’empêche nullement d’éprouver le même type d’émotion sous les voûtes de la cathédrale de Chartres. Admirer Homère ou Aristote n’implique pas de renoncer à apprécier saint Thomas d’Aquin ou Pascal. Ajoutons (ce qui ne va malheureusement plus de soi en cette époque d’effondrement civilisationnel où nous subissons les injonctions des « terroristes intellectuels » inspirés par les délires d’outre-Atlantique) que l’on peut admirer un penseur sans nécessairement en partager toutes les analyses. Rappelons même cette évidence : reconnaître que les « racines » de la civilisation européenne sont plus anciennes que le christianisme n’interdit pas d’être soi-même chrétien, et ne remet pas en cause la validité des dogmes catholiques pour tous ceux qui y adhèrent. Il s’agit d’un constat qui s’inscrit dans l’ordre de l’analyse historique, et non dans celui de la foi ou de la religion : il s’agit de reconnaître que la civilisation européenne est DEVENUE chrétienne, c’est-à-dire que son destin historique ne saurait être dissocié de l’apport chrétien, tout en admettant que les premiers développements de cette civilisation, qui constituent notre héritage le plus lointain, sont antérieurs à l’arrivée du christianisme en Europe. À rebours, il ne faut pas non plus oublier que le christianisme a beaucoup reçu de l’Europe, en s’implantant sur son sol : il suffit pour s’en convaincre de mesurer l’importance des emprunts à la pensée grecque, aux modes d’organisation « romains » (dans ses variantes « occidentales » et « orientales »), ainsi qu’aux traditions locales en manière de « piété populaire » depuis les premiers siècles de l’Église jusqu’à nos jours – aussi bien chez les catholiques et les protestants que chez les orthodoxes.

    La seconde raison pour laquelle l’identité civilisationnelle de l’Europe ne peut être qualifiée de « judéo-chrétienne » repose sur un autre constat, celui du refus du message chrétien par le judaïsme post-christique.

    Ce n’est pas faire insulte au judaïsme que de rappeler qu’il s’est développé à partir du début de notre ère en opposition avec le christianisme, dont il rejette les dogmes ou les articles de foi pour de nombreuses raisons, sur la validité desquelles l’historien n’a d’ailleurs pas à se prononcer.

    Cela ne signifie naturellement pas que les rapports entre les fidèles des deux religions ont été toujours conflictuels au fil des siècles, ni que les chrétiens n’ont pas poursuivi un dialogue intellectuel souvent fécond avec les représentants du judaïsme (comme cela a d’ailleurs été également le cas avec certaines élites musulmanes, sans que l’on éprouve le besoin de parler d’islamo-christianisme).

    Nul ne niera que de nombreux Juifs aient contribué de manière éminente au développement de la civilisation européenne, que ce soit dans les domaines artistiques, scientifiques ou économiques. Pour autant, cela ne fait pas du judaïsme en tant que tel, en particulier dans sa version « post-christique », une source première de notre civilisation. Le fait que le monothéisme chrétien se soit développé à partir de racines juives n’implique pas qu’il faille nécessairement parler de « judéo-christianisme » : viendrait-il à l’esprit de nos contemporains d’évoquer l’existence d’un « judéo-islamisme » ? L’islam est pourtant, à bien des titres, beaucoup plus proche du judaïsme que ne l’est demeuré le christianisme depuis son implantation en Europe. Le monothéisme musulman procède assez directement de l’inspiration du monothéisme juif, alors que le christianisme s’est écarté sur de nombreux points essentiels de ses racines juives, en particulier avec l’idée d’incarnation : l’image du Christ, « vrai Dieu et vrai homme », est tout aussi impensable pour le judaïsme que pour l’islam. On rappellera au passage que les historiens des religions ont parfois émis l’hypothèse d’une influence exercée sur le premier judaïsme par la civilisation iranienne ancienne, d’origine indo-européenne, qui a connu elle-même une évolution « monothéiste » précoce avec le zoroastrisme : les choses ne sont donc pas simples dans ce domaine.

    Si le judaïsme a exercé une influence certaine sur la civilisation occidentale à plusieurs reprises au cours de son histoire (notamment au moment du renouveau des études hébraïques dans le sillage de l’humanisme de la Renaissance), on notera que les communautés juives installées en Europe ont elles-mêmes été largement imprégnées de culture européenne, ce qui les a dotées d’une identité distincte de celles des communautés demeurées hors d’Europe.

    Le judaïsme et l’islam se distinguent cependant sur un point fondamental dans leur rapport avec l’Europe chrétienne, dans la mesure où l’islam n’a quasiment jamais cessé, depuis sa première phase d’expansion, de représenter une menace militaire et civilisationnelle pour le monde chrétien, qu’il s’agisse de l’Empire byzantin ou de l’Occident médiéval. Rappelons que la conquête de l’Espagne par les Maures est bien antérieure aux premières croisades, et que l’Empire ottoman a occupé une partie significative de l’Europe balkanique dès avant la chute de Constantinople.

    Rien de comparable ne s’est assurément produit dans le contexte des rapports entre les différentes communautés juives et l’Europe chrétienne.

    Pour autant, l’emploi de la notion de « judéo-christianisme » nous semble procéder d’un raccourci contestable, impropre à définir l’essence de notre civilisation, qu’il convient tout simplement de qualifier d’européenne, sans lui accoler d’autres qualificatifs réducteurs.

    Le judaïsme n’a pas joué un rôle suffisamment décisif et direct sur l’identité de l’Europe pour que nous puissions définir cette dernière à partir de références religieuses, ethniques ou civilisationnelles finalement distinctes de ses propres racines. Cela ne signifie naturellement pas que les communautés juives installées depuis des siècles en Europe ne soient pas devenues parfaitement européennes. Il convient simplement de ne pas inverser le rapport d’influence et d’antériorité historique en qualifiant notre civilisation de « judéo-chrétienne », ce qui procède d’une double confusion intellectuelle. Il serait à tout prendre plus conforme à la réalité historique d’évoquer la notion d’helléno-christianisme, compte tenu des emprunts majeurs réalisés par la théologie chrétienne à la tradition philosophique grecque, même si le latin s’est naturellement imposé comme la langue de l’Église dans l’Occident chrétien.

    Par ailleurs, rappeler que l’Europe a entretenu dès l’origine des rapports conflictuels avec le monde musulman n’implique pas de considérer exclusivement l’islam sous ce rapport : les impératifs géopolitiques peuvent naturellement amener des nations européennes à traiter en alliées avec des puissances appartenant à la sphère civilisationnelle musulmane, qui ne présente d’ailleurs guère d’unité, que ce soit sur le plan religieux, linguistique, ethnique ou politique. Ce constat n’implique évidemment pas de reconnaître l’islam comme une composante de notre civilisation, en dépit de la présence de nombreux musulmans sur le sol européen (présence, dans la plupart des cas, récente à l’échelle de l’histoire). Si l’on peut parfaitement être musulman et ressortissant d’un pays européen, cela ne peut conduire en aucune manière à considérer la France comme un « pays musulman » (contrairement aux propos effarants récemment tenus par un ambassadeur de France dans un pays nordique, à la suite des débats sur le « séparatisme musulman » suscités par les attentats islamistes commis dans notre pays).

    Il est évident que les vagues migratoires massives en provenance de « terres d’islam », qui ont pénétré sur le sol européen depuis un demi-siècle avec la complicité plus ou moins active des élites politiques, économiques, intellectuelles, médiatiques et même religieuses, placent l’Europe devant la menace d’une modification radicale de son identité ethnique et culturelle. Il n’est pas certain qu’il soit possible de réduire la fracture provoquée par cinquante ans de trahisons et d’impérities en recourant à une définition biaisée des origines de notre civilisation.

    Contrairement aux admonestations des thuriféraires de l’intégration « républicaine », cette fracture ne correspond pas à un risque à venir, qui procéderait du repli « identitaire » de certains Européens. Cette fracture s’est DÉJÀ produite, et elle est le résultat de cinquante années de folle politique migratoire. Est-ce à dire que cette fracture nous place dans une situation irrémédiable ? Conviendrait-il, comme certains nous y incitent, d’en nier la portée dans l’espoir d’en limiter les conséquences ?

    L’Institut Iliade propose une autre voie : celle qui consiste à inviter les Européens non seulement à retrouver la mémoire de leur passé, mais surtout à se réapproprier pour l’avenir les vertus qui ont permis à leur génie civilisationnel de se déployer, il y a plus de cinq mille ans.

    L’aventure n’est pas terminée, mais l’heure est décisive ; elle requiert la plus grande lucidité. Ne nous payons plus de mots et renonçons aux facilités de langage qui nous égarent. Le concept de « civilisation judéo-chrétienne » est vide de sens lorsqu’il s’agit de définir l’identité collective de nos peuples. Osons promouvoir, incarner et défendre la CIVILISATION EUROPÉENNE, dont les origines ont été merveilleusement mises en lumière par les travaux de Georges Dumézil et Émile Benveniste [1].

    Henri Levavasseur (Institut Iliade, mars 2021)

     

    Note :

    [1] Rappelons, à l’intention des censeurs « vigilants » à qui cette information pourrait avoir échappé, que le linguiste Émile Benveniste, auteur d’une magistrale étude sur le « Vocabulaire des institutions indo-européennes » (Paris, Les Editions de Minuit, 1969), est né à Alep en 1902, de deux parents instituteurs de l’Alliance Israélite. Naturalisé français en 1924, ce grand savant honora sa patrie d’adoption par la qualité de ses travaux. Si cet exemple éminent démontre qu’il est possible à quelques individus d’exception de DEVENIR européen, il ne nous conduit pas pour autant à penser que l’identité civilisationnelle de l’Europe se réduit à la caricature d’un grand melting pot.

     

     

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  • Pour un réveil européen !...

    Les éditions de la Nouvelle Librairie viennent de publier, dans la collection de l'Institut Iliade, un ouvrage dirigé par Olivier Eichenlaub et intitulé Pour un réveil européen. Présenté par Philippe Conrad et Grégoire Gambier, il est complété par une postface d'Alain de Benoist.

     

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    " Vivre, aimer, servir, combattre, transmettre, conscients de notre double vocation d’héritiers et de refondateurs : tel est l’appel au grand réveil des Européens que lancent les auteurs de ce livre, membres ou amis de l’Institut Iliade. Les douze chapitres de l’ouvrage nous invitent ainsi à une réflexion actualisée sur les trois impératifs de la triade homérique définie par Dominique Venner.

    Reconnaître la nature comme socle, c’est respecter les équilibres naturels et renouer avec la dimension communautaire de nos tarditions pour rebâtir la cité sur le fondement de notre identité.

    Rechercher l’excellence comme but, c’est cultiver l’exigence envers soi-même et tendre à se dépasser pour renouer le fil de la continuité avec « ce que nous sommes », sous une forme toujours renouvelée, depuis des millénaires.

    Viser la beauté comme horizon, c’est rompre avec l’utilitarisme bourgeois et refuser l’extension du domaine de la laideur, c’est adopter une éthique de la tenue et suivre la voie des « cœurs aventureux », déterminés à ré-enchanter notre monde et retrouver le sens sacré.

    Il n’y a aucune fatalité au déclin des peuples et des nations d’Europe. Lorsque les lumières s’éteignent, les torches doivent s’embrasser !

     

    Ont participé à cet ouvrage : Jean-Philippe Antoni • Alain de Benoist • Anne-Laure Blanc • Thibaud Cassel • Philippe Conrad • Olivier Eichenlaub • Paul Éparvier • Grégoire Gambier • Jean-François Gautier • Jean-Yves Le Gallou • Henri Levavasseur • Alix Marmin • Rémi Soulié • Guillaume Travers. "

     

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  • Ce que nous sommes...

    L'Institut Iliade et les éditions Pierre-Guillaume de Roux viennent de publier, sous la direction de Philippe Conrad, un ouvrage collectif intitulé Ce que nous sommes - Aux sources de l'identité européenne. Historien et président de l'Institut Iliade, Philippe Conrad s'est entouré de Jean-Yves Le Gallou, cofondateur de l'Institut et président de la fondation Polémia, ainsi que de François Bousquet, Thibaud Cassel, Édouard Chanot, Jean-François Gautier, Grégoire Gambier, Christopher Gérard, Éric Grolier, Henri Levavasseur, Lionel Rondouin et Jean-Louis Voisin, pour composer ce chant polyphonique d'amour et de combat pour l'Europe de demain.

     

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    " Il y a quelques années, après avoir prophétisé le « choc de civilisations », Samuel Huntington interrogeait ses compatriotes : Qui sommes-nous ? Cette question essentielle se pose aujourd’hui aux Européens sur leur propre sol. Ce que nous sommes, c'est ce que nous déciderons de continuer à être, dans la fidélité à nos héritages, à nos lignages, et à l'enthousiasme d'un avenir toujours possible. L'effort de reconquête suppose une relecture de notre histoire et une réappropriation de nos traditions européennes, conditions nécessaires pour éclairer et affirmer ce qui nous distingue des autres et ce que nous entendons préserver.
    Ce manifeste s'adresse à tous ceux qui refusent la fatalité du déclin de notre civilisation. "

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